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Analyse du Document 7 : "Le 'Q de Tobin'"

Sujet principal

Ce court document des Dossiers d'Alternatives économiques (2016) présente le concept du "Q de Tobin", un indicateur économique développé par l'économiste américain James Tobin (1918-2002, Prix Nobel d'économie 1981) qui mesure le rapport entre la valeur boursière d'une entreprise et sa valeur économique de remplacement.

Idées principales

  1. Définition du Q de Tobin:
    • Ratio entre la valeur boursière d'une entreprise et sa "valeur de remplacement" (coût théorique pour reconstituer l'entreprise à l'identique).
    • Indicateur utilisé pour orienter les décisions d'investissement et de cession d'actifs.
  2. Logique économique du modèle:
    • Si Q > 1 (valeur boursière > valeur de remplacement): les dirigeants ont intérêt à investir car le marché valorise les actifs plus cher qu'ils ne coûtent.
    • Si Q < 1 (valeur boursière < valeur de remplacement): les actionnaires ont intérêt à vendre car l'entreprise rapporte moins qu'elle ne coûte.
  3. Limites conceptuelles:
    • Le Q de Tobin va à l'encontre du théorème de Modigliani-Miller.
    • Sa validité repose sur une hypothèse fragile: que la Bourse évalue parfaitement la valeur d'une entreprise, ce dont l'auteur exprime des doutes.
  4. Contribution plus large de Tobin:
    • Tobin est davantage célèbre pour sa proposition de taxe sur les opérations de change.
    • Cette taxe visait à "jeter du sable dans les rouages des marchés monétaires internationaux" qu'il jugeait, dans la lignée de Keynes, trop spéculatifs et déstabilisateurs.

Analyse et conclusions

  • Le Q de Tobin s'inscrit dans une approche financière de l'investissement, où les décisions sont guidées par la valeur de marché relative aux fondamentaux économiques.
  • Ce concept repose sur l'hypothèse d'efficience des marchés financiers, qui est régulièrement remise en question par l'observation des bulles spéculatives et des krachs boursiers.
  • L'indicateur peut néanmoins servir d'outil de diagnostic pour identifier des situations de sur ou sous-valorisation potentielles.
  • Le document souligne la tension entre deux visions de l'économie: l'une qui fait confiance aux marchés pour valoriser correctement les actifs, et l'autre qui se méfie de leur propension à la spéculation excessive.

Chiffres importants

Le document ne contient pas de données chiffrées spécifiques.

Critiques et limitations

  • Le document est très concis et ne développe pas les applications pratiques ni les études empiriques sur la pertinence du Q de Tobin.
  • Il n'explique pas précisément en quoi le Q de Tobin contredit le théorème de Modigliani-Miller.
  • Une perspective hétérodoxe pourrait souligner davantage l'instabilité intrinsèque des marchés financiers et leur tendance à créer des cycles d'euphorie et de dépression qui déconnectent les valorisations boursières des fondamentaux économiques.
  • Le texte n'aborde pas les difficultés méthodologiques de calcul de la "valeur de remplacement", qui peut être particulièrement complexe pour des entreprises à forte composante immatérielle ou technologique.
  • Le document n'évoque pas les critiques post-keynésiennes qui mettraient l'accent sur les anticipations conventionnelles et l'incertitude radicale plutôt que sur les calculs rationnels basés sur des valeurs de marché supposées "justes".
  • L'approche de Tobin sur la taxation des transactions financières, mentionnée brièvement, représente pourtant une vision plus critique des marchés que son indicateur Q, ce qui montre une certaine tension dans sa pensée économique.